Ze manoir

vendredi, mai 27, 2005

À la fonderie.

J'ai cette affinité avec les métaux. La machinerie lourde m'excite. Les métaux et moi, on se comprend. La scie ronde ou à ruban, la perceuse, sableuse, polisseuse. Ou la soudure. Quand on fait gicler une goutte de métal chaud sur les pièces à assembler. Comme si ce métal, au contact des corps, devenait un acide trop puissant, pas le bon choix de métal. Et si yavait pas de bon choix? Quand le métal-acide s'étend sur les corps, ça pétille et trop souvent ça explose au visage. On retrouve des sillons de larmes éternelles. L'acide qui fond fait trembler les corps. Mais souder deux aimants du même pôle? Je sais pas le résultat. Ils s'attirent à se repousser. Ça crée une tempête dès qu'ils sentent leur souffle. Genre de fission nucléaire trop grande. Ils disent qu'il faut équilibrer, que de toute façon, la création n'existe pas. À quoi bon?
J'ai envie de m'asseoir à la fonderie et m'imprégner du jus de l'acier fondu. Me crever les yeux avec du magnésium, ne pas porter de masque. Regarder la chaleur et sourire sous l'éclat fondu de l'acier. J'observe et me fait toute petite, loin sur ma poutre qui domine au plafond. Malgré tout, à la fonderie, on racole sur mon sujet. On dit que j'ai les cuisses aussi chaudes que lorsqu'on fond le fer. Il paraît que ça renforce le coeur. À la fonderie, les métaux refusent les moules. Ils préfèrent se couler les uns dans les autres, une suite ininterrompue de caresses et de brûlures. Assise universelle, j'admire les métaux qui n'ont que ça à faire, s'entrechoquer et se mirer face à face, polis dans leurs façade, encore brûlants de leurs étreintes. Je ne peux même plus compter le nombre de fois que je me suis mordue les lèvres, la langue. Visions torturaires, j'ai jamais pu retrouver chez moi la stupeur de leur beauté.
À la fonderie, on racole que j'ai les cuisses aussi chaudes que lorsqu'on fond le fer. Mais il paraît que ça renforce le coeur. À la fonderie, on est poli jusqu'à des miroirs. On n'espère jamais faire pleurer des coeurs fondants. À la fonderie, quand je mets à égalité, c'est sur ma poutre. Alors on voit pas sous ma jupe. Et ça, c'est le plus grand des podiums.

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Pour s'incliner

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